Les colonies françaises
in L'Europe domine le monde, Belin 1ere 1982
-documents p 10
L’idéologie colonialiste
La colonisation est la force expansive
d’un peuple, c’est sa puissance de reproduction, c’est sa dilatation et
sa multiplication à travers les espaces; c’est la soumission de
l’univers, ou d’une vaste partie, à sa langue, à ses moeurs,
à ses idées et à ses lois. Un peuple qui colonise,
c’est un peuple qui jette les assises de sa grandeur dans l’avenir et de
sa suprématie future. Toutes les forces vives de la nation colonisatrice
sont accrues par ce débordement au-dehors de son exubérante
activité. Au point de vue matériel, le nombre des individus
qui forment la race s’augmente dans une proportion sans limite; la quantité
des ressources nouvelles, des nouveaux produits, des équivalents
en échange jusqu’alors inconnus, qui se trouvent solliciter l’industrie
métropolitaine, est incommensurable; le champ d’emploi des capitaux
de la métropole et le domaine exploitable ouvert à l’activité
de ses citoyens sont infinis. Au point de vue moral et intellectuel, cet
accroissement du nombre des forces et des intelligences humaines, ces conditions
diverses, où toutes ces intelligences et ces forces se trouvent
placées, modifient et diversifient la production intellectuelle.
Qui peut nier que la littérature, les arts, les sciences d’une race
ainsi amplifiée n’acquièrent un ressort que l’on ne trouve
pas chez les peuples d’une nature plus passive et sédentaire ?
Il se produit aussi dans ce domaine
intellectuel un phénomène analogue à celui que nous
avons noté dans le domaine de l’industrie. Quand le personnel des
arts libéraux se recrute parmi les citoyens d’une même race,
qui ont peuplé de vastes contrées des quatre parties du monde,
n’est-il pas naturel que
les oeuvres intellectuelles soient
plus nombreuses et plus remarquables? D’un autre côté, quand
un écrivain sait qu’il s’adresse dans sa propre langue à
des milliers de lecteurs situés à des milliers de lieues,
quel encouragement n’est-ce pas, quel appui et en même temps quel
frein? Si ces effets bienfaisants ne se font pas sentir avec une grande
intensité dans la première période des établissements
coloniaux, c’est qu’alors toutes les forces vives y sont tournées
vers la poursuite de la richesse; mais un temps arrive bientôt où
l’intelligence dans ces contrées neuves se porte à des spéculations
plus sereines et où elle s’élance dans le monde des idées
au lieu de se refermer, comme au berceau, dans le monde des faits.
A quelque point de vue que l’on
se place, que l’on se renferme dans la considération de la prospérité
et de la puissance matérielle, de l’autorité et de l’influence
politique, ou qu’on s’élève à la contemplation de
la grandeur intellectuelle, voici un mot d’une incontestable vérité
: le peuple qui colonise le plus est le premier peuple; s’il ne l’est pas
aujourd’hui, il le sera demain.
Paul Leroy-Beaulieu, De la
Colonisation chez les peuples modernes, 1874.
Les colonies françaises
« La France est une des premières
nations colonisatrices: son empire colonial, immense, occupe le deuxième
rang dans le Monde, après celui de l’Angleterre.
Caractères généraux
de nos colonies. - Ces colonies sont très diverses, situées
dans les cinq parties du Monde et à des latitudes très différentes.
Leurs productions sont par suite très variées, ce qui est
favorable au commerce; et notre flotte de guerre trouve dans toutes les
parties du monde des points d’appui. Elles sont aussi très étendues,
8.941.377 kilomètres carrés (avec 41 millions et demi d’habitants),
environ 16 fois la superficie de la France. Notre domaine colonial vaut
à la France bien des jalousies.
Pourquoi les Français ont
colonisé. - La situation de la France, ouverte sur deux mers, invitait
les Français aux longs voyages. Leur hardiesse, leur esprit d’aventure
les y poussaient également. Aussi les Normands, les Bretons, les
Gascons se lancèrent, dès le XVe siècle, vers les
mondes inconnus.
Plus tard, au XVIIe siècle,
le désir de faire une France plus grande et celui de faire bénéficier
nos frères lointains des bienfaits de la civilisation les poussèrent
à coloniser. Peu de peuples ont montré un pareil désintéressement
Ces conquêtes ont eu une
très grande utilité pour notre patrie: au point de vue économique,
les colonies achètent à la métropole ses produits
manufacturés et lui fournissent les matières premières
(sucre de canne, riz, coton, laine, caoutchouc, ivoire) elles favorisent
la marine marchande, au point de vue militaire, elles offrent à
notre flotte de guerre des lieux de refuge et des points d’appui.
La France possède un immense
empire colonial. Il lui faut, pour le défendre, une flotte de guerre
puissante; nous l’avons. Il lui faut, pour en tirer parti, une marine marchande
nombreuse; nous ne l’avons pas. Il lui faut, pour rester en communication
constante avec lui, un réseau de câbles sous-marins; nous
n’en avons que quelques-uns.
Questionnaire.
1. Faites la liste des colonies
françaises.
2. Quels sont les caractères
généraux de nos colonies ?
3. Pourquoi les Français
ont-ils colonisé ?
(Le maître pourra faire la
comparaison avec les méthodes de colonisation des Espagnols et des
Anglais.)
4. Quelle est l’utilité
des colonies ? »
Manuel de géographie.
programme 1902.
Cours Moyen, 2e Année
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