Les TICE et l’enseignement de l’histoire Entretien avec Daniel Letouzey,
Daniel Letouzey est professeur
d’histoire et de géographie
dans un lycée français. C’est un des pionniers de
l’utilisation
des TICE dans l’enseignement de l’histoire. Il a
participé à
la création de la liste H-Français ; il est
secrétaire
de l’association des Clionautes, deux espaces virtuels qui
militent pour
la diffusion des TICE en histoire et en géographie. Le Cartable l’a interrogé, par Internet comme il se doit, sur sa pratique et sur l’apport spécifique des TICE en histoire. Sa réponse est à la fois le regard personnel de quelqu’un qui connaît particulièrement bien ce domaine, et le reflet d’une réflexion collective puisque le courrier électronique lui a permis d’interroger d’autres Clionautes acteurs des TICE, et de leur faire relire cette contribution. La rédaction du Cartable le remercie chaleureusement ainsi que tous les collègues qui ont peaufiné son texte. Le Cartable - Commençons cet entretien par une question extrêmement banale : parmi les idées les plus répandues en faveur des TICE, en particulier du net, figure l’accès facile à une information extrêmement abondante et diverse. De nombreux sites proposent des « documents » de toutes sortes sans que les références soient toujours indiquées. Comment apprendre aux élèves, mais aussi aux enseignants et à nous-mêmes, à ne pas se perdre dans une telle abondance, à se repérer et à contrôler l’information ? Quels sont les moyens, pas trop coûteux en temps, à mettre en œuvre pour développer l’esprit critique ? S’interroger sur « l’information extrêmement abondante », c’est mettre en avant une des représentations de l’Internet - celle de la Toile définie comme une Encyclopédie Universelle Virtuelle -, un slogan publicitaire efficacement diffusé par les fournisseurs d’accès. En fait, Internet est avant tout un outil de communication, et donc d’abord un carnet d’adresses, un instrument de travail en réseau. Jusqu’ici, cette fonctionnalité a plutôt été négligée dans l’enseignement en France. L’abondance est réelle, surtout
pour les internautes
qui ont accès au web en anglais : une recherche sur Cette abondance est en partie illusoire : « Jean Monnet » est cité 107 000 fois, mais 2 600 références concernent un « lycée Jean Monnet » ; 16 seulement renvoient à une biographie du « père de l’Europe ». Internet n’est donc ni une bibliothèque scolaire , ni une encyclopédie structurée, ne serait-ce que parce que l’accès libre et gratuit a fait fuir les éditeurs scolaires. La Toile ressemble plutôt à une immense foire internationale, à une auberge espagnole : on y trouve ce qu’un internaute a pris le temps d’élaborer et de diffuser. L’abondance (et la pénurie) n’est pas limitée au réseau virtuel. La revue Le débat n° 125 publie un article où Emmanuel Hogg oppose, à propos de l’audiovisuel, « une culture de la rareté et de la lacune » à « l’orgie contemporaine des signes » ; l’auteur analyse le passage de « l’amnésie par défaut » à « l’oubli par excès ». Des observations semblables pourraient être appliquées à l’inflation des archives contemporaines, dans une société qui voudrait « Tout garder ? Les dilemmes de la mémoire à l’âge médiatique ». Appliquée à l’éducation, la question de la profusion des données n’est pas nouvelle : les accusations fréquentes d’encyclopédisme en témoignent. Internet donne l’opportunité d’explorer à nouveau ces débats, à travers les rapports complexes que l’éducation entretient avec les « nouvelles » technologies successives : l’audiovisuel, l’informatique… L’arrivée du réseau
coïncide avec la
volonté d’ouvrir davantage l’école sur le
monde extérieur.
Les attentes du système scolaire et les méthodes de
travail
ont de fait beaucoup changé depuis une génération.
Dans les années 1960, pour un élève,
l’essentiel était
d’écouter, de comprendre et de savoir restituer une
leçon
; le manuel, le cours, les morceaux choisis (par des adultes)
étaient
à la base du travail scolaire. Aujourd’hui, le même
élève
doit être capable, sur un sujet qu’il découvre
parfois, de
définir une problématique, de trouver les sources utiles,
de rédiger une synthèse finale. Bibliothèques,
Centres
de Documentation et d’Information (CDI), Internet deviennent des
auxiliaires
incontournables. C’est ensuite prévoir dans le cursus scolaire une double formation technique indispensable : la maîtrise de la recherche documentaire classique, la pratique des outils spécifiques développés sur Internet. Les éléments nécessaires à cette formation existent. Encore faut-il pouvoir consacrer à cet apprentissage le temps nécessaire, et ne pas considérer comme acquises des compétences que l’on a oublié d’enseigner et d’évaluer… La pratique du travail avec les élèves incite à replacer Internet dans une chaîne documentaire plus large . Un « carré documentaire » peut associer les attentes de l'enseignant qui a donné le travail, le contenu spécifique du manuel, l'exploration des ressources du CDI et des catalogues des bibliothèques, enfin l’emploi de ressources en ligne, pour actualiser, personnaliser, approfondir la recherche. Une telle démarche évite de perdre du temps en clics stériles : pourquoi laisser les élèves se précipiter vers Internet quand un auteur a publié un ouvrage faisant le point sur la question à étudier ? Face aux ressources disponibles sur Internet, professeurs
et élèves sont dans des situations très
différentes. En travaux de groupes, pour
l’enseignant, plusieurs
démarches sont possibles : . Soit faire exploiter les ressources du réseau en faisant appel aux moteurs de recherche. La pratique incite à ne pas se limiter à la lecture du premier écran (dans les préférences, étendre à 30 le nombre de réponses affichées) et à ne pas hésiter à reformuler une requête en tenant compte des premières réponses. Dans tous les cas, il est possible d’utiliser
les annuaires
thématiques, quand ils ne se contentent pas de faire
l’inventaire
des vitrines officielles et institutionnelles, mais ont pris le temps
de
repérer des applications pertinentes pour le travail scolaire.
Ainsi, Internet est un outil d’autant
plus efficace
que l’on sait ce que l’on cherche, que l’on a appris
comment chercher utilement,
et qu’une connaissance raisonnable des questions à poser
permet
d’évaluer l’intérêt et la pertinence
des ressources
disponibles. La culture historique déjà acquise, la
maîtrise
des savoir-faire, l'habitude de la navigation sur le réseau
ainsi
qu’une dose de chance aident à repérer la mine ou
le filon,
c'est à dire, pour nous, le site conçu par le
spécialiste
de la question. Comment apprendre à valider l’information ? La question ne se pose généralement pas pour les livres, ni pour les journaux auxquels les élèves peuvent accéder dans une bibliothèque ou dans un CDI : le choix en a été fait par des adultes responsables. Par contre, l’absence de validation est le tendon d’Achille d’un réseau auquel ses détracteurs reprochent la présence des négationnistes et des pédophiles. Dans l’histoire de la Shoah,
plutôt que déplorer
la présence des négationnistes, nous
préférons
faire connaître l’important travail déjà
accompli :
ainsi les activités du Cercle d’étude de la
déportation
et de la Shoah (« Enseigner la Shoah », Primo Levi…)
sont publiées
en ligne. La correction des copies, au baccalauréat, incite aussi à relativiser la question de la validation : ainsi, dans l’étude de documents, où les candidats doivent exploiter, « y compris de manière critique », les informations contenues dans un dossier, la présentation se limite souvent à un « copier/coller » des sources mentionnées dans l’épreuve. Trop peu d’élèves ont la culture, la formation, l’initiative nécessaires pour réussir, un jour d’examen, une lecture distanciée des documents : combien savent expliquer ce qu’était le « Comité ouvrier », signataire d’une affiche gaulliste de 1958 fréquemment utilisée au brevet et au baccalauréat ? Combien savent décoder et remettre en contexte le vocabulaire d’une affiche électorale ou d’un discours politique ? Pour valider les ressources accessibles sur
Internet, il
existe des réponses simples et « rassurantes » :
La solution, longue, lente et difficile,
doit s’inspirer
du travail des historiens et de leur méthode critique. Une
critique
externe, sur les conditions de production et de réception
d’un document,
et plus encore une critique interne, celle que permet une connaissance
raisonnable du sujet et une pratique de sources diversifiées.
Cette
démarche, appliquée à Internet, poursuit le
travail
habituel en classe d’histoire.
Le travail avec ordinateur reste une exception ; il occupe rarement plus de 15 % du temps disponible, sauf dans les expériences en cours de « cartables électroniques » qui soulèvent des problèmes pédagogiques spécifiques. Les modifications portent plus sur le support que sur les méthodes : avec l’accès rapide à Internet, avec le DVD, il est devenu commun de vanter les mérites du multimédia. Les choix techniques n’induisent pas par eux-mêmes une innovation pédagogique. Les TICE s’accommodent de toutes les situations pédagogiques, aussi bien lors d’une recherche en effectif réduit en Education civique, juridique et sociale (ECJS), lors d’un travail individuel au CDI, que lors d’un cours magistral (dialogué) auquel le vidéo-projecteur donne l’apparence d’une coûteuse modernité. L’utilisation des TICE a d’abord été le fait d’une poignée de pionniers défenseurs des méthodes actives : correspondance entre classes, enquêtes sur le terrain, mise en ligne de sites conçus par des groupes d’élèves. Plus récemment, les différentes formes de travaux personnels -Itinéraires De Découverte (IDD) en collège, Travaux Personnels Encadrés (TPE) en lycée, ou Projet Pluridisciplinaires à Caractère Professionnel (PPCP) en lycée professionnel- ont plaidé en faveur d’une pédagogie du projet. La demande en salles d’ordinateurs, aussi bien pour la recherche documentaire, que pour la rédaction des productions finales, a fortement augmenté, tout comme les budgets liés au papier et à l’encre d’impression. La classification des
activités d'apprentissage
peut s’inspirer de celle proposée par Robert Bibeau :
Le métier d’enseignant est profondément renouvelé, mais pas seulement en histoire. D’abord parce les listes de
diffusion ont provoqué
une mutation profonde dans la circulation de l’information :
elles
ont atténué le monopole de l’information
hiérarchique
descendante. Ces listes ont créé un espace pour des
échanges
que la mise en cause de la formation continuée risquait de faire
disparaître. Internet est une chance pour ceux qui
veulent mutualiser
leurs ressources. Au total, Internet rend de multiples services à ceux qui ont appris à s’en servir : communication à distance, accès à une documentation élargie (catalogues des bibliothèques, presse en ligne, comptes rendus d’ouvrages, conférences virtuelles…), élaboration et édition de contenus diffusables sur le réseau, transferts de fichiers …. Changements dans l’identité
professionnelle
? Cette introduction modifie-t-elle le temps didactique ? Utiliser les TICE est parfois
présenté par
les pionniers comme un moyen de gagner du temps. En fait, concevoir
seul
une séance devant ordinateur exige beaucoup plus de temps que
préparer
un cours classique.
La mesure de l’apport de
l’informatique à l’apprentissage
de l’histoire, est la question centrale, mais Serge Pouts-Lajus
l’a bien
montré, c’est « une question impossible ».
Impossible,
dans la mesure où de multiples facteurs, humains et techniques,
sont en jeu. Hervé Bois a tenté de comparer le travail de
deux classes similaires, l'une utilisant des outils classiques, l'autre
se servant des ordinateurs. Nos collègues anglo-saxons abordent
depuis longtemps
cette question : La géographie est en avance sur
l’histoire dans
ce domaine : en Belgique, les géographes de Liège
publient
des propositions originales d’activités permettant de
développer
des « compétences terminales en géographie
».
En France, le site de l’AFDG, celui de la revue EspacesTemps
donnent une
plus grande place à la didactique. Ce qui n’empêche
pas Gérard
Hugonie de s’interroger : « Pourquoi les recherches
didactiques ne
modifient-elles guère les pratiques scolaires ? » :
Quels exemples de pratiques
spécifiques proposer
? L’apport des TICE est à chercher avant tout dans la dimension interactive, pas toujours facile à maîtriser en classe : le courrier électronique est ainsi un moyen de prolonger les acquis de la correspondance scolaire. Faire travailler des élèves sur la géographie d’une autre région, en associant livres et courrier, est une bonne source de motivation, et un moyen de personnaliser l’information. De plus, faire évaluer le résultat par une classe dont les élèves habitent l’espace étudié est une occasion de confronter espace vécu et géographie scientifique. Internet, pour les élèves, c’est aussi l’accès à une partie de la presse, dont les 200 « unes » mise en ligne sur un site américain. Ainsi, en ECJS, la presse est une source importante dans une recherche sur les OGM. Elle permet de faire lire les articles, de faire sélectionner des arguments contradictoires, de les faire présenter dans une synthèse allant au delà du simple copier/coller. Dans la revue Les Cahiers
pédagogiques,
Dominique Natanson et de Karine Ansart montrent comment il est
possible,
en IDD, de « Travailler autrement », sur une production
collective
« Le grand livre des chevaliers de la Table ronde », et
d’utiliser
un autre mode d’évaluation, celui des ceintures de
compétences
(N° 413-414). De nombreuses autres pistes sont en cours d’exploration : utiliser des expositions en ligne (« La Couleur des Larmes », « La crise de Cuba ») ; travailler sur l’image fixe ou animée (« Le quai des images », en particulier par le travail de lycéens sur Banania et l’image des Africains) ; intégrer des extraits vidéo de l’INA, dans un cours, et les confronter aux autres sources (exemple de la Guerre d’Algérie) ; sonder la place du jeu dans l’enseignement de l’histoire (site Ludus, à Caen). La maîtrise du temps historique ne
dépend
pas seulement de l’usage des TICE. Le Cartable : Comment affronter le décalage croissant entre les progrès rapides et constants de l'informatique et l'équipement moyen du corps enseignant et des établissements scolaires ? Ne risque-t-on pas de poursuivre des objectifs illusoires en se situant dans la perspective de ce à quoi tous les élèves d'une classe d'âge auront droit en la matière ? Cette question néglige l’effort considérable d’équipement qui a été fait ces dernières années. Bien sûr, certains établissements sont en pointe, d’autres à la traîne, les lycées sont souvent mieux dotés que les collèges, les sections techniques plus que l’enseignement général, les séries scientifiques plus que les sciences humaines. Mais il est généralement possible d’accéder à une salle équipée. La « fracture numérique
» suscite
des analyses opposées : Pour d’autres, cette fracture ne se limite pas à l’école et à la jeunesse, et elle n’est pas plus décisive que les inégalités qui caractérisent l’accès à l’éducation, à l’emploi ou à la santé. Alain Rallet montre que les technologies de l’information n’effacent pas la fracture territoriale, mais qu’au contraire, elles renforcent le rôle des métropoles et des pôles dynamiques (Sciences Humaines - n°104 - Communication à distance : au-delà des mythes). Le Cartable : En prolongeant la question précédente, cela fait déjà de nombreuses années que les ‘autorités’ disent vouloir développer l’usage des TICE dans l’enseignement de l’histoire. Or, les enquêtes disponibles montrent que cet usage se diffuse avec beaucoup de lenteur. A quels facteurs attribuez vous ces lenteurs ? La lenteur transparaît dans un rapport récent de l’Inspection générale, qui sous-évalue probablement la réalité des pratiques dans les classes : ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/syst/igen/rapports/annexehistgeo.pdf Un autre rapport récent, établi par une équipe de Nantes pour l’INRP, souligne surtout l’écart énorme entre l’usage personnel généralisé de l’ordinateur par les enseignants et la faiblesse relative de l’utilisation de cet outil en classe. Beaucoup d’enseignants ont acquis, sur leur temps personnel et familial, les compétences multiples nécessaires à notre métier aujourd’hui, mais seule une minorité s’en sert avec les élèves en salle informatique. Cette étude met en évidence une
typologie
des styles pédagogiques : « une gradation allant des
«
pionniers » (ou « experts »), en passant par les
«
hésitants » (ou « anxieux », voire «
inquiets
»), jusqu’aux « résistants ». Il est
clair que
l’usage de ces classifications, sorties du champ scientifique, ne
constitue
pas seulement des modèles de lecture de
l’intégration des
TICE mais bien une mesure globale de la culture enseignante propice ou
non à l’innovation pédagogique ».
- Les directives officielles
contradictoires : - Le modèle économique : Internet est fondé sur une gratuité contraire aux pratiques et à l’intérêt des éditeurs privés. La numérisation leur sert fréquemment de prétexte pour mettre en place une tarification prohibitive. D’où une crise du logiciel éducatif, aggravée par la médiocrité des rares applications pédagogiques disponibles. - La question controversée des droits d’auteur, un problème réel et complexe, est la source d’un énorme paradoxe : il est possible d’accéder à de larges extraits d’ouvrages du XIXe siècle, alors que les résultats de la recherche récente, qui mettent très souvent en cause leurs conceptions dépassées, sont rarement mis en ligne dans une forme accessible à nos élèves ! Le Cartable : En ce qui concerne les moyens d'enseignement, pourrons-nous vraiment aller plus loin que des supports-papier enrichis d'un CD-Rom ? Rien ne s’oppose à mettre sur le net une véritable banque de données proposant des séquences pédagogiques, il existe déjà des sites en ce sens, et pas seulement des textes, comme cliotexte ; que pensez-vous de ces premières expériences et quels sont les contenus pertinents qu’il convient d’y mettre pour que la diffusion et l’utilisation dépassent le petit monde des convaincus ? Cette question en recouvre plusieurs autres,
qui ne dépendent
pas seulement des utilisateurs : Le gouvernement français vient
d’affirmer sa volonté
de piloter et de structurer toutes les initiatives, de fournir en 2007
à chaque élève, chaque enseignant et chaque
famille
un espace numérique de travail (ENT). Une agence pour la
promotion
des usages éducatifs effectuera un recensement des «
bonnes
pratiques éducatives ». Un réseau de vigilance
bloquera l’accès aux sites répréhensibles.
Du côté des éditeurs, les expérimentations, en cours, sur les cartables numériques et sur les espaces numériques en ligne, suggèrent de grandes manœuvres, destinées à créer un nouveau marché, au croisement de l’éducation et du divertissement (Edutainment). Les productions du groupe de travail E-Education de la FING (Fondation Internet Nouvelle Génération) sont très éclairantes sur cette évolution : http://www.fing.org/index.php?rubrique=ecartable Le succès croissant d’Internet ne doit pas masquer l’échec relatif de l’enseignement de l’histoire assisté par l’ordinateur. L’intérêt d’un logiciel, c’est soit d’automatiser un apprentissage, soit de traiter des données brutes et d’aider à modifier le regard sur le monde qui nous entoure. Ainsi, en géographie, un logiciel de cartographie statistique donne à VOIR immédiatement une réalité chiffrée ; dans un tableau de chiffres, celle-ci ne serait repérable qu’après une lecture longue et attentive. Nos collègues historiens anglo-saxons ont plus que nous exploré cette dimension : je les ai vus, en 1989, utiliser des bases de données pour enseigner l’Angleterre de Charles I et de Cromwell.
Les séquences pédagogiques en
ligne,
évoquées dans la question, ont leurs sites
spécialisés :
Gilles Badufle recense à ce jour 170 sites personnels, Eric
Ranguin,
Jean-François Carémel ont recensé un volume
important
de cours et d’exercices. Ces publications, qui témoignent
de la
démocratisation de l’écriture hypertexte, ont
trouvé
leur public. Mais l’offre reste très en deçà
de ce
qui est proposé par nos collègues anglais, dont ceux de
Schoolhistory
: Dans une toile pédagogique utopique mais soucieuse des besoins des utilisateurs, plusieurs pistes seraient à explorer : contribuer à la diffusion de la recherche historique, suggérer de multiples pistes pédagogiques, fournir des outils élaborés. Sur ce dernier point, prenons l’exemple des données statistiques : entre la citation très partielle dans les manuels et l’accès payant à certains sites spécialisés, la mutualisation des ressources ferait gagner beaucoup de temps. D’une manière générale, l’essentiel n’est pas d’accéder à tous les textes, à toutes les images, mais de pouvoir accéder rapidement à un petit nombre de documents pertinents et de pouvoir les exploiter sans enfreindre le droit en usage. Mais cela supposerait trois changements importants : - Poursuivre la rupture en cours avec un
enseignement
obsédé par le récit et le survol global.
- Exploiter les potentialités
offertes par le
multimédia. - Fédérer toutes les
initiatives pour
alimenter enfin de façon significative la toile
pédagogique
francophone. Dans les conditions actuelles de travail, le travail de
l’enseignant
reste un travail artisanal, reposant largement sur la collecte et
l’exploitation
d’outils divers conçus pour d’autres publics.
Internet fournit les
moyens de modifier cette situation héritée. A voir
l’énergie
présente sur le réseau, il est possible Daniel Letouzey – 22/09/2003 Le
cartable de Clio : |