ADAM RAYSKI *

LE MASSACRE DE LA CASCADE DU BOIS DE BOULOGNE

16-17 AOÛT 1944



Sommaire :

Introduction p. 3

Paris se soulève p. 5

Témoignage de Michèle Boursier p. 9

Le massacre p. 13

Les résistants de Chelles p. 15

À propos de " Jeanne " p. 21


INTRODUCTION

Sanglant mois d'août 1944. Le vent de la défaite souffle sur les armées allemandes qui vont se livrer à une série de massacres à Paris et dans la région parisienne. Pour les mouvements de la résistance c'est le moment de l'insurrection ouverte avec — pour corollaire — la recherche d'armes par tous les moyens y compris parfois les plus imprudents. Pour les nazis, la " retenue " qui était de rigueur auparavant avec des assassinats légaux (tribunaux militaires et exécutions au Mont Valérien) n'est plus de mise : on tue en public à la cascade du Bois de Boulogne, à Chelles, rue Leroux à Paris. La Libération s'approche et les cadavres s'accumulent. À l'origine de la plupart de ces morts, un agent de l'Abwehr (services du contre-espionnage de la Wehrmacht) qui, se faisant passer pour un émissaire de l'Intelligence Service de Londres, fera tomber un groupe de jeunes des JCC (Jeunes combattants chrétiens), de l'OCM (Organisation civile et militaire) et des FTPF. 

Un mois plus tôt il a provoqué l'arrestation de nombreux cadres de l'AJ (Armée juive). Un épisode tragique qui a été relaté et analysé largement dans notre ouvrage, Le Choix des Juifs sous Vichy, Ed. La Découverte, (pp. 307-311), sur la base des notes écrites par des responsables de l'AJ ayant vécu le " piège " et survécu par chance.

En revanche, notre enquête menée sur le " massacre de la Cascade ", bien qu'il s'agisse d'un événement largement connu et commémoré ofciellement depuis longtemps, s’est heurtée à un vide archivistique.
Il est vrai qu'il n'y a pas eu, ou presque pas, de survivants. La police française, prise déjà dans le mouvement pré-insurrectionnel, avait probablement négligé de dresser des procès-verbaux. L'aurait-elle fait, les constats n'auraient pas été suivis d'éléments d'enquête sur les circonstances du massacre.

Et pourtant, à la " Section du XXème Siècle " des Archives Nationales (72AJ61, pièce A.I 21) nous avons trouvé un " Rapport " fait par les parents d'un garçon fusillé, Pierre Sarabayrouse, membre de la jeunesse catholique combattante.
Le rapport en question a été remis (on ignore la date) au Comité d'Histoire de la Seconde Guerre mondiale auprès du Premier ministre. À la liquidation du Comité, en 1980, ses archives sont passées à l'IHTP (Institut d'Histoire du Temps Présent) et également aux Archives Nationales.

Le point de départ du " Rapport " est l'abbé Borme, de la Conférence Saint-Vincent-de-Paul du XIIIème arrondissement de Paris, très proche de la Jeunesse catholique combattante (JCC) ; il apparaît comme une figure centrale, et suit de près les efforts de cette organisation dans la recherche d'armes à la veille de l'Insurrection de la Capitale.

Ce qui frappe dans cette ruée vers les armes des résistants, c’est qu’ils ne font pas preuve d’un minimum de circonspection. Nous ne portons pas un jugement de valeur mais un constat.
D’ailleurs, des résistants plus avertis sont souvent victimes des mêmes agents de l’Abwehr. Leur technique avait, avant tout, une dimension psychologique en installant dans la relation avec leur interlocuteur un climat de confiance asbolue au point d’aboutir, en quelque sorte, à un envoûtement. Cela est particulièrement évident le jour du 16 août ou le piège se referme. Les résistants redeviennent eux-mêmes lorsqu’un des garçons pousse le cri : " les Fridolins sont là ! ".

En somme, d’un côté, des hommes assoiffés d’armes et impatients d’avoir l’honneur de se battre et de donner leur vie pour la France ; de l’autre, des hommes assoiffés de sang et affolés devant l’imminence de leur défaite.
 


PARIS SE SOULÈVE

L'abbé Borme connaît une résistante, infirmière de la Croix-Rouge, " Jeanne " (lire p. 9) et il sait par elle qu'elle est susceptible, grâce à ses relations, de se procurer des armes. 
Jeanne est en contact avec un certain Alexandre qui travaille dans un service de renseignements anglais. " Son chef — dit le rapport — est Charles Borel (il faut lire Porel). Ce dernier est sous les ordres d'un officier cité souvent dans le rapport sous le nom de " Capitaine ". Jeanne se charge d'établir le contact entre les résistants et Alexandre. [NDLR : le dossier concernant ce dernier, annexé au "Rapport", a mystérieusement disparu].
Elle organise, en premier lieu (on ignore la date), une rencontre entre Jean Guerin, le responsable de la jeunesse catholique, et Alexandre .
Jean Guerin et Alexandre se sont retrouvés à quelques reprises. Aucune indication sur les sujets abordés. Mais on se doute que l'objet principal — sinon unique — était la mise en place de la remise des armes aux intéressés. Au premier rendez-vous de Jean Guerin avec Alexandre auquel elle assiste, Jeanne retrouve " Katherine ", une connaissance, [Lydia Tscherwinska], accompagnée de Porel. Cette dernière ne fait pas mystère de ses relations amoureuses avec Charles Porel, parfait dans son rôle d'agent de l'Intelligence Service. Ses victimes, les jeunes qui seront assassinés la nuit du 16 au 17 août 1944, découvriront, trop tard, son véritable rôle .
D'autre part, Jeanne présente à Alexandre, Fernand Bellanger " dit Bizet ", responsable militaire des JCC ainsi que le jeune Guy Hemery de l’OCM. L'opération de remise des armes, souhaitée la plus large possible par les soi-disants agents des renseignements britanniques, se met progressivement en place. Jean Guerin et Guy Hemery préparent les équipes chargées de la récupération des armes et établissent, d’autre part, une liaison avec les FTPF de Chelles (Seine et Marne).

Jean Guerin est arrêté le 7 août par la Gestapo dans des conditions qu'on n'a pu éclaircir. " Cette arrestation ne paraît pas avoir un lien direct avec la présente affaire " estime-t-on. À propos de cette arrestation, il n'est pas sans intérêt de noter que des " disparitions isolées " en cas de filature était une méthode fréquente dans la police, soucieuse de ne pas éveiller, dans les organisations, des soupçons de filature. Quant à nous, nous sommes enclins à penser que Jean Guerin, chef confirmé, devait manifester quelques doutes sur ses interlocuteurs pour que ces derniers se décident à le faire disparaître. Après un court séjour à Fresnes, il fait partie du " convoi de déportés du 16 août. "

Après plusieurs rendez--vous, entre autres avec Guy Hemery, Alexandre, le " Capitaine " et Charles Porel , accompagné systématiquement de Katherine (Lydia Tscherwinska), se dégage le plan de rassemblement des résistants en trois points géographiques, autrement dit le mécanisme du guet-apens :
- JCC : Rue Troyon reliant les Avenues de Wagram et de Mac-Mahon
- FTPF (Chelles) : Angle rue Saint-Ferdinand et rue d'Armaillé 
- OCM : Rue St-Ferdinand et Avenue de la Grande Armée
On arrive à la date fatidique du 16 août.

Le groupe de Chelles, au nombre de 17 hommes, conduit par Favet et Schlosser, s'est rendu vers 10 heures sur le lieu de rendez-vous, s’installant sur la terrasse du café " Le Franc-Tireur " [Le nom de ce café vient d’un monument à la gloire des Francs-Tireurs de la guerre de 1870 qui se trouvait à cette époque sur la petite place qui porte aujourd’hui le nom de Tristan Bernard].

Le Dr Blanchet de Chelles est venu en ambulance dans laquelle ont pris place deux ou trois résistants, tous les autres sont venus en camion. [De ce groupe de Chelles, il y aura trois rescapés dont Favet. On ignore le nom des autres].
   

Le monument des Francs-Tireurs des Ternes


Le monument des Francs-Tireurs des Ternes dits " à la branche de houx " (1870-1871) aujourd’hui place Tristan-Bernard. 

Le bataillon des Francs-Tireurs des Ternes, formé par M. de Vertus, s'illustra dans plusieurs combats, notamment à Buzenval au cours de la guerre de 1870. En octobre 1941, Pétain décide de supprimer statue et monument en alliage cuivré au prétexte de " besoins industriels ".
 

 


LE TÉMOIGNAGE DE MICHELLE BOURSIER

Michelle Boursier, alias Diane, est responsable féminine nationale des Jeunes Catholiques Combattants. Elle est venue rue Troyon en vélo. Les résistants catholiques s'impatientent et envoient Diane retrouver le " Capitaine " qui devait être à la Porte Maillot.
Rescapée, Diane témoigne sur les circonstances de la réalisation du guet-apens concernant les jeunes catholiques. Par contre, elle ignorait ce qui se passait au même moment avec le groupe de Chelles.

Les JCC arrivent et presque en même temps le camion de l'OCM que l'on a dépanné, conduit par un chauffeur de l'OCM. Diane fait part de cette arrivée au " Capitaine " et demande dans quel camion il convient de monter. Le " Capitaine " répond d'occuper son camion à lui et de ranger celui de l'OCM. Le chauffeur de ce camion a vu arriver la Gestapo qui s'est emparée de son camion ; il a pu s'enfuir à temps. Les jeunes montent. Diane, sur ordre du " Capitaine " prend place également alors qu'elle se disposait à repartir en bicyclette.

Auparavant, Guy Hemery a dit aux quatre de l'OCM, sur ordre du " Capitaine ", de se désarmer. Ils ont donc laissé leurs mitraillettes (2 ou 3) dans le camion de l'OCM. Ils ont conservé cependant sur eux leur révolver. Derrière le premier camion, les deux autres restent toujours en attente. Il est environ midi. Le camion part. Le " Capitaine " s'en va de son côté. 

Guy Hemery devient le chef de " l'expédition " et selon les instructions reçues ferme de l'intérieur le camion. Deux hommes inconnus sont à l'avant dont l'un conduit. Guy explique qu'il y aura deux arrêts. Au premier, personne ne doit bouger ni regarder. Au second seulement on se trouvera à destination. On roule environ cinq minutes. Le camion s'arrête. Il est visible, par les fentes du camion, que l'on se trouve dans une large avenue d’où l'on aperçoit le Ballon des Ternes [Il s'agissait d'un monument représentant un ballon qui servait, en 1870, quand Paris était investi par l’armée prussienne — aujourd'hui Place du Général Koenig, vers l'entrée de l'hôtel Concorde- - NDLR].
  

Le ballon des Ternes 


Le ballon des Ternes fut inauguré, le 28 janvier 1906, place de la Porte des Ternes. Il évoquait le Siège de Paris lors de la guerre de 1870 et le système de communication aérien qui avait été mis en place pour rompre l'isolement de la capitale. C'est ainsi que Gambetta pu quitter Paris le 7 octobre 1870 pour tenter d'organiser la défense en province.

Il a été démoli à la même date que le monument des Francs-Tireurs, en octobre 1941, suite à la décision de Pétain.

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Le quartier des Ternes : lieu du piège :



Un terrain vague est situé sur la droite. Au bout de cinq minutes d'arrêt, on s'impatiente. Un jeune entrouvre la bâche et aperçoit des soldats allemands qui s'approchent : " Voici les Fridolins ! " s’écrit-il effaré. Bizet recommande le silence.

Subitement, des injonctions : " Raus "... Coups de crosses dans les panneaux et mitraillade. Tous se couchent. Les jeunes de l'OCM sortent leurs revolvers. Une voix de l'extérieur dit en français : " Sautez ". Les rafales continuent. Bizet fait rentrer les armes : " C'est inutile " dit-il… Sous le feu on commence à sauter du camion. Diane est la 3ème. Celui qui a sauté avant elle est blessé aux jambes. A la vue de Diane, le feu cesse tout net. Bizet se trouve légèrement blessé à la tête. Nouvelles rafales de mitraillettes pendant plusieurs minutes, dirigées sensiblement au-dessus des têtes.

Il y a plusieurs voitures allemandes disséminées dans l'avenue. Un cordon d'une vingtaine d'Allemands (uniforme vert) tous armés. Deux agents de la Gestapo (uniforme marron, croix gammée rouge au brassard). Un Français en civil, à l'allure débraillée, muni d'une mitraillette. Pas un passant (sans doute y a t-il des barrages).

Fouille générale : Diane est l'objet de brutalités et est jetée à terre (coups de poings et coups de pieds). Les bras levés, tous réintègrent le camion sur injonction de la Gestapo et du Français qui montent eux aussi dans le camion. Ce sont les mêmes chauffeurs vraisemblablement qui sont à l'avant. Il est midi et demi. On roule vers la rue des Saussaies. Dix minutes après environ on est à destination. Le groupe, mains levées, descend du camion. On lui adjoint quelques hommes dans la même situation se trouvant dans la cour.

Tous sont mis face au mur, mains levées. Deux Français en civil surveillent munis de matraques. Vers 2 h, un officier installé dans la cour fait l'appel individuel et relève lui-même, à la machine, les renseignements d'identité. Pas d'interrogatoire sur l'expédition. Tous reviennent un à un au mur, les mains désormais sur la tête et resteront ainsi.

À 20 h 30 environ, Diane est menée en cellule seule. Vers 22 h, un soldat la conduit dans un bureau : trois officiers s'y trouvent. On lui rend son sac. Elle est libérée. La cour qu'elle retraverse est vide. Un soldat lave le pavé.  


LA NUIT TOMBÉE - LE MASSACRE

Aucun témoignage sur ce qui s'est passé depuis les faits relatés jusqu'à la découverte des cadavres. On apprend par la Préfecture de Police que des cadavres de fusillés ont été rassemblés par les gardes du Bois de Boulogne et emmenés dans un garage, 55 rue Chardon-Lagache à Paris 16ème.

Les corps ont été découverts à la Grande Cascade du Bois de Boulogne. C'est un moniteur chef de l'École des Cadres de Bagatelle (Lefebvre) qui, les ayant aperçus, a prévenu les gardes. 
Diane prévenue se rend sur place le vendredi 18 et reconnaît à son tour les 9 corps des JCC et OCM, celui de Guy Hemery, et, lui semble-t-il, celui d'un chauffeur de camion aperçu rue des Saussaies. Quatorze corps sont donc identifiés. Beaucoup d'autres sont identifiés peu après par la résistance de Chelles et de Draveil. La Croix-Rouge en possède la liste exacte. 
Les corps non réclamés sont inhumés collectivement à Bagneux, le samedi 19 dans l'après-midi. 

Une absoute générale avait pu être donnée au garage de la rue Chardon-Lagache par l'abbé Borme le vendredi 18 à 8 h 45 en présence du Maire du 16ème arrondissement, du Commissaire de Police, des personnalités de la Croix-Rouge, quelques familles et des membres de la résistance. 

Jeanne, dès la connaissance du drame, recherche " Alexandre " au téléphone. Celui-ci se présente le vendredi 18 fin de matinée. Se trouvent justement réunis l'abbé Borme et Jeanne.  
" Alexandre " est effondré, il paraît découvrir peu à peu le rôle du " Capitaine " : " moi qui vient de lui donner encore des adresses dont celle du Général… (?), commandant le service de Renseignements russes à Berlin… ". (Un peu bizarre !) 
Alexandre ajoute qu'il doit conduire Katherine Tscherwinska dans les huit jours à Nancy.

Tscherwinska, de son côté, donne signe de vie en essayant de joindre Jeanne sans aucun succès le dimanche 20 vers quatre heures. Elle a été arrêtée le 29 août à 2 h du matin à son domicile, Hôtel Molière, 18 rue de Vaugirard. Elle a été incarcérée au Vélodrome d'Hiver où se trouvait déjà Charles Porel, arrêté lui-même par la police française au moment où, tentant de rejoindre Nancy, il traversait nos lignes. 
Finalement, Charles Porel est interné au camp de Drancy et " Katherine " transportée au Fort de Noisy à Romainville.

Le procès de Charles Porel — de son vrai nom Karl Rehbein —, de Lydia Tscherwinska et des gestapistes français a été ouvert au Tribunal militaire de Paris le 20 novembre 1952. Sur le banc des accusés, une femme et treize hommes, dont Georges Guicciardini et ses deux fils qui avaient à peine 20 ans. Le cas de Rehbein (Porel) a été dissocié parce que " officier allemand en service ". Quant à Tscherwinska, elle a été relaxée, le Tribunal ayant considéré qu'il n'existait pas de preuves suffisantes prouvant qu'elle connaissait le véritable rôle de son amant. Le Tribunal a rendu son verdict le 23 décembre en prononçant huit condamnations à mort et sept autres par contumace.
 


LA WEHRMACHT SE VENGE SUR LA POPULATION CIVILE DE CHELLES


Le Comité de libération de Chelles a été formé pendant l'occupation allemande. Il sort de la clandestinité le lundi 21 août et se réunit le lendemain pour désigner les membres de la " la Commission municipale ". C'est Monsieur Schlosser, dont le fils fut fusillé à la Cascade, qui est élu Maire […].

Le vendredi 25 août , un groupe de militaires allemands, après avoir entouré la maison habitée par Madame Verdeaux, lancent quelques grenades, blessant grièvement celle-ci. On sait que son fils Rolland avait été fusillé huit jours avant à la Cascade. Puis les militaires se dirigent vers la maison d'à côté d'où ils sortent un groupe d'enfants de 16 à 17 ans dont le deuxième fils de Madame Verdeaux. Emmenés au Parc municipal, ils sont tous abattus […].

Vers 20 h 30, toujours le vendredi 25, les Membres, des FFI et plusieurs personnalités de Chelles, se rendirent au Parc Municipal où ils constatèrent, face à la Mairie, qu'un assez grand nombre de corps gisaient pêle-mêle sans signe de vie. Il y en avait treize. Tragique spectacle qui dépassait en horreur tout ce que l'on peut imaginer. Douze corps furent identifiés malgré la rage avec laquelle s'était acharnée sur eux la soldatesque hitlérienne, quelques-uns étaient défigurés par la mitraille et les grenades. Douze de ces malheureux étaient morts, le treizième, un Algérien prisonnier évadé, faisant partie du Corps Franc, donnait encore signe de vie […]. 
Les corps de ces victimes furent conduits aussitôt dans la salle paroissiale de l'avenue A. Caillou transformée en chapelle ardente.
En outre, il fut constaté que des mines avaient été posées près de la Mairie et quelques-unes avaient fait explosion provoquant une destruction partielle de la façade du bâtiment principal […].

Les collaborateurs notoires, ainsi que les prisonniers allemands incarcérés à proximité, avaient été délivrés par les nazis et emmenés avec eux afin de les protéger, notamment les Jaudot, miliciens, le ménage Irrigoyen, le gestapiste Lang, le père Dubois, en tout une vingtaine d'individus.
* Extrait des délibérations du Comité de libération de Chelles du 21 au 25 août 1944

   

Au 10 de la rue Leroux

Toujours le 17 août, au petit matin, les premiers passants découvrent sept cadavres gisant sur le trottoir devant le n° 10 de la rue Leroux, Paris 16ème.
Les meurtriers ne prennent plus soin de cacher leurs crimes. Ils le signent car, dans l'immeuble, se trouve une annexe de létat-major de la Gestapo ( Ironie de l’Histoire, aujourd’hui siège de la F.N.D.I.R.P...) ! 
La plaque apposée énumère les noms des sept résistants avec la mention " ... tombés dans une embuscade de la Gestapo ".

 

L’arbre au Bois de Boulogne : 


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Monument érigé au Bois de Boulogne sur lequel sont gravés les noms des 35 martyrs

 


À propos de " Jeanne "

On comprendra aisément notre étonnement de trouver, dans les premières lignes du " Rapport ", que " Jeanne " se trouve être Sabine Zlatin !  
" L’abbé est en relation avec Jeanne, — y lit-on — infirmière Croix-Rouge, Croix de guerre 1940. Directrice de la Maison des enfants réfugiés de l’Ain, à Izieu. Services nombreux dans la Résistance. Recherchée par la Gestapo (mari déjà déporté) ". 
Il nous semblait nécessaire de séparer ce paragraphe de son contexte. Ceci pour être en mesure d'analyser en toute clarté son rôle dans ce tragique événement. La première question venant à l'esprit est pourquoi Sabine Zlatin n'évoque pas, dans ses mémoires, le crime de la Cascade.  C'est exact, mais la lecture des pages 60-61 nous apporte un début d’explication. 

Après la déportation des enfants, elle revient à Paris où elle ne retrouve ni parents ni amis : " Que pouvais-je faire, alors, qui donnerait un sens à ma vie ? J’ai cherché à m’employer dans la Résistance ".
Et, quelques lignes plus loin, ce qu'elle dit constitue sans doute une allusion au crime de la Cascade : " Puis survint l’annonce du débarquement. Ce fut pour les mouvements de résistance une période d’activité fébrile. Et aussi de répression particulièrement féroce d’une Gestapo nerveuse." 
Un traumatisme qu'elle ne tenait pas à raviver. C'était bien sûr son droit de ne pas en parler mais ce n'était surtout pas dans son intérêt de ne pas témoigner : toute occultation, en historiographie, indépendamment des raisons, ouvre la porte aux hypothèses les plus fantaisistes. 
" Jeanne " est tombée, comme bien d'autres, dans le piège raffiné de l'Abwehr. 

" Sabine Zlatin, Mémoires de la dame d’Izieu. Avant-propos de François Mitterrand, Gallimard, 1992.
  

* Adam Rayski :  http://aphgcaen.free.fr/blois/etrangers/rayski.htm

Crédits photos :
- Mairie du XVIIe arrondissement

- Mairie de Chelles
- Annie Rapoport Rayski

    Voir aussi Les fusillés de la Cascade du bois de Boulognele travail de Guy Krivopisco et Axel Porin 

mise en ligne DL - mai 2007